J’ai cassé aujourd’hui; brisé de l’intérieur. Une sorte de fissure qui s’est créée. Bonne ou mauvaise? C’est trop tôt pour le dire. Tout ce que je sais c’est que je me suis effondré, en larmes, le long de la route vers la maison. J’étais perdu, au beau milieu de nulle part, à plus de 13000 km de mes ancrages sacrés. Comment ai-je abouti ici? Pourquoi suis-je encore ici? Là-bas, serait-ce vraiment mieux?

Tous mes sens s’étaient fermés : je n’entendais plus rien, je ne voyais plus rien, je ne sentais plus rien et… je n’étais plus rien. À cet instant précis, je regrettais mon départ en voyage, mon plan de la prochaine année et mon arrêt au Lesotho. Je ne savais plus d’où je venais et où j’allais. Je n’avais qu’une seule envie : rentrée chez moi, auprès des miens, et de les serrer très fort dans mes bras. Pendant ces quelques minutes qui m’ont paru des heures, j’étais littéralement perdu géographiquement et émotionnellement. La noirceur s’est ainsi tranquillement extirpée de moi en pleurs et la lumière a refait surface.

Au contraire de ce que je pensais lorsque j’étais agenouillé, les yeux pleins d’eau à chercher mon souffle, cette crise était pour le mieux. Je me rappelle avoir vécu des événements semblables, à plus petite intensité, lors de mes voyages précédents. Après quelques jours de voyages, je craquais et je sentais quelque chose se transformer en moi. La crise était difficile et noire, mais la suite était belle et pleine d’espoir. Je me rappelle que c’est seulement au-delà de ces crises que j’étais vraiment en mode « voyage ». C’est à partir de ces moments-là que j’avançais concrètement vers mon objectif et que j’arrêtais de regarder en arrière.

Optimiste de nature, j’ose espérer que c’était le cas de cet incident. Que dès demain, et ce après 45 jours de voyage, j’entrerai vraiment dans mon aventure. Celle remplie d’échanges équitables et authentiques. Celle qu’on ne vit qu’une seule fois et qui change notre vie.

Symboliquement, j’ai coupé l’ongle de mon petit doigt gauche. Cet ongle que je laissais pousser jour après jour, depuis mon départ, ne sachant pas trop pourquoi ni quand je sentirais le besoin de le couper.

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