Mes rêves me parlent

Prendre une décision telle que de tout vendre et de partir voyager ne se fait pas du jour au lendemain; c’est un long processus conscient et inconscient. Pendant plusieurs mois, mes rêves me parlaient, me guidaient ou me faisaient douter.

Ce n’était qu’un rêve

Je me rappelle, il y a plus d’un an, lorsque mon projet de voyager sur une longue période n’était qu’un simple souhait, mes nuits étaient quelquefois visitées par des rêves de voyages très flous. Je me réveillais avec une étrange impression d’avoir accompli quelque chose d’important et de marquant dans ma vie, sans toutefois ne savoir quoi. Je sentais que j‘avais besoin d’un changement majeur dans ma vie pour me permettre de trouver certaines réponses. Cependant, ce “besoin” de changement n’était pas nouveau pour moi. Les gens qui me connaissent savent très bien que la biographie de mes 18 à 32 ans pourrait s’intituler « Mes 7 cycles de 2 ans ». À ce moment, je décidai donc d’ignorer ce que me disaient mes rêves.

Après le Ghana, j’ai vécu une période difficile (j’y reviendrai sûrement dans un article ultérieur). J’étais à la recherche d’une raison de continuer à avancer. Je ne parle pas là d’idées suicidaires, loin de là, mais plutôt d’une étincelle qui ramènerait le Francis fonceur et visionnaire. “Frank the tank” comme dirait mon ami Francis (je sais, nous avons le même nom). Un jour, je ne me rappelle pas vraiment quand ou comment, mais je me suis mis à visualiser si, et quand, mon grand voyage pourrait prendre forme. Je savais que la fin du projet pour lequel je travaillais était prévue pour la fin de l’été suivant, mais c’était encore très loin. Je me suis donc dit “On verra…”. Toutefois, vous savez ce que ça fait une graine lancée au fond d’un jardin fertile comme le mien… ça prend tranquillement racine, ça croît et ça revient habiter mon esprit.

Ce n’était qu’un rêve

Le rêve conscient

Un peu plus tard, même s’il n’était encore qu’un concept vague qui faisait des petits dans ma tête, j’ai été confronté à une décision qui allait ouvrir une première porte à mon rêve : le renouvellement de mon bail. Plusieurs mois avant juillet, n’ayant aucune idée de ce qui me réservait le travail en septembre, sans même savoir où je résiderais pendant 2 mois, je devais décider si mon projet était plausible ou utopique.

Lorsque ma décision fut prise de courir le risque, mes rêves se décidèrent à venir hanter mes nuits. Pendant que dans le jour je commençais tranquillement à mettre en place cette idée folle de partir voyager, advenant que mes opportunités professionnelles soient limitées en septembre, la nuit, je cauchemardais d’expériences noires de vagabondage. Je me faisais attaquer, je me perdais, je m’ennuyais trop, je me voyais fermer toutes les portes ou je mourrais, tout simplement. Mon inconscient faisait douter mon conscient.

On dit souvent qu’il faut écouter son inconscient afin de nous aider à prendre de bonnes décisions. Je crois cependant que lorsqu’il s’agit d’un choix crucial tel que celui de tout vendre et de découvrir le monde plus plusieurs mois, les messages de notre inconscient seront, pendant un certain temps, teintés par nos craintes personnelles et notre imagination négative.

Cette période fut heureusement temporelle dans mon cas. Si elle s’était prolongée plus de quelques semaines, j’aurais sûrement mieux fait de résoudre cette impasse et de changer mes plans.

Le rêve conscient

Faire le choix de ne plus rêver

Lorsque ton inconscient négatif lâche prise, tes rêves, tes sentiments, tes idées, tes plans et ton environnement externe s’harmonisent (certains diront que les planètes s’alignent). C’est à ce moment que tu commences à articuler ton projet et à réellement avancer dans une seule direction. Plus tu avances, plus tes idées et tes rêves sont solides. Ce qui au début te faisait douter devient des arguments personnels qui t’aideront à faire face aux doutes, aux craintes et aux contre-arguments des autres; ceux avec qui tu partageras tes intensions. Il y aura TOUJOURS des personnes qui voudront, volontairement ou non, te convaincre de changer d’idée. N’essaie pas de les convaincre, ni même de trop argumenter. Contente-toi de recevoir leur pensée, d’acquiescer légèrement de la tête en disant : “Merci! Je vais tenir compte de ton commentaire”, et d’ensuite digérer le tout à tête reposée pour finalement ignorer, ou non, leurs arguments.

Pendant ce temps, entoure-toi de gens positifs et enclins à t’aider. Des gens qui te présenteront quelquefois des limites à tes idées, mais qui t’aideront surtout à trouver des solutions à ces obstacles. Ces alliées sont nécessaires à l’établissement d’un plan solide et à l’accomplissement d’un grand rêve.

Mon projet de voyage et de partage était loin de ce qu’il est maintenant. Il continue de changer encore aujourd’hui (voir l’article “Les plans changent”). Quelques personnes importantes dans ma vie m’ont aidée à adapter mon rêve pour en faire une réalité réaliste. Sans leurs soutiens, leurs encouragements et leurs commentaires constructifs, je serais peut-être encore chezmoi en train de me convaincre que l’Afrique c’est trop chaud, trop pauvre et trop dangereux.

Je tiens à les remercier du plus profond de mon cœur. Ils et elles sauront se reconnaître. MERCI!

Faire le choix de ne plus rêver

" Lorsque tu voyages, tu fais une expérience très pratique de l’acte de renaissance. Tu te trouves devant des situations complètement nouvelles, le jour passe plus lentement et, la plupart du temps, tu ne comprends pas la langue que parlent les gens. Exactement comme un enfant qui vient de sortir du ventre de sa mère. Dans ces conditions, tu te mets à accorder beaucoup plus d’importance à ce qui t’entoure, parce que ta survie en dépend. Tu deviens plus accessible aux gens, car ils pourront t’aider dans des situations difficiles. […] En même temps, comme tout est nouveau, tu ne distingues dans les choses que la beauté et tu es plus heureux de vivre. "

Ça me rappelle quelque chose, pas vous ?

Article "Les Premiers"


Les plans changent

Il faut croire que les plans sont faits pour être changés. J’aurais pourtant dû le savoir après 3 ans à travailler pour la réinvention des ressources humaines chez BRP. Dans mon esprit, je ferais le touriste en Afrique du Sud et en profiterais pour un petit passage au Lesotho, un pays montagneux entouré par l’Afrique du Sud dont j’avais entendu parler en bien sur plusieurs points.

Lesotho

Premièrement, Lesotho semble avoir été figé dans le temps avec ses villages parcimonieux d’où s’érigent quelques dizaines de huttes de pierres et de paille. C’est toutefois explicable lorsque pour y entrer, on doive affronter l’une des routes les plus cahoteuses et abruptes de l’Afrique du Sud. Ce fameux passage, appelé Sani Pass est un fleuron pour les Basotho (habitants du Lesotho) qui se voient menacé(e)s par la reconstruction entière et l’asphaltage. Cette initiative provoquerait automatiquement la destruction d’un paysage unique et la perte de centaines d’emplois, car beaucoup de Basotho ont développé une business en s’équipant d’un véhicule à quatre roues motrices et en transportant les visiteurs et habitants d’un côté à l’autre du passage.

Basotho

Deuxièmement, la majorité des touristes se limitent à entrer au pays par le Sani Pass afin d’y atteindre le fameux Sani Top , l’un des sommets les plus élevésdu Lesotho, qui offre une vue imprenable sur les environs et le passage, pour ensuite retourner en Afrique du Sud et continuer leur voyage. De ce fait, il suffit de s’enfoncer quelques centaines de kilomètres pour y rencontrer un peuple ultra accueillant et peu habitué aux rencontres étrangères.

Le peuple Basotho est connu comme le plus à la couverture, car ils et elles ont l’habitude de se couvrir d’une grande couverture et d’une tuque ou d’un passe-montagne. Il vit principalement d’agriculture, de fermes et d’artisanat. Les femmes restent principalement à la maison et s’occupent de la besogne familiale, tandis que les hommes quittenttôt le matin avec le bétail (moutons, vaches, ânes ou chevaux) et s’aventurent dans les vallées montagneuses, offrant la nourriture quotidienne nécessaire aux animaux.

Et moi dans tout ça?

Quelques jours avant le Lesotho, Michelle et moi rencontrons Mapaseka, une guide locale, sur le chemin entre Duran et Sani Lodge, un hébergement à 30 minutes du Lesotho, duquel nous effectuons notre randonnée de 2 jours dans les montagnes du Drakensberg. Michelle, c’est la fille de Singapour avec qui j’ai voyagé quelque temps.

Mapaseka nous invite donc, à la suite de notre randonnée, dans son village natal où elle y offre un hébergement en milieu familial, deux heures après avoir traversé Sani Pass et les douanes lesothanes, le bus local nous débarque sur le bord de la route. Autour de nous, deux montagnes et une vingtaine de huttes, à peine visibles au loin. Nous voilà donc à Makhapung. N’essayez pas de trouver l’endroit sur Google, Makhapung ne se définit même pas comme village… c’est un « secteur d’habitations ». Vous ne pourrez que trouver Mokhotlong à 15 km d’ici.

Nous dormons dans une petite hutte privée, nous avons notre propre cuisine, la toilette se limite à un profond trou, on se lave dans un bac d’eau de 50 cm de diamètre, la famille habite dans les huttes adjacentes, les voisins nous saluent, les villageois sont curieux et les enfants courent, rient, jouent et nous observent. Il y a aussi une école primaire à 20 minutes à pieds et ils sont ouverts aux genres d’échanges que je recherche. Après deux nuits, je me sens déjà chez moi… c’est décidé, je reste! Michelle continuera son voyage sans moi.

Fier de ma couverture Basotho!

Bulungula | Afrique du Sud (Photos)

Bulungula | Afrique du Sud

Après deux nuits à Coffee Bay et une randonnée de deux jours, je me suis enfin retrouvé dans un village typique comme je les aime. Bulungula abrite une communauté traditionnelle Xhosa et ses habitants se maquillent régulièrement le visage avec de la terre glaise et parlent le xhosa, une langue composée de "clics". Je m’y suis arrêté sept jours et j'en suis tombé amoureux. 

Résumé de mes activités

  • Habiter dans une auberge colorée et paisible: Bulungula Lodge;
  • Déjeuner aux crêpes sur la plage pendant le lever du soleil;
  • Me permettre une randonnée équestre;
  • Participer à une journée "Pouvoir aux femmes" pendant laquelle j’ai :
    • Été maquillé selon la tradition Xhosa;
    • Réparé les murs d’une hutte avec un mélange de terre et de caca de vache;
    • Transporté du bois et de l’eau sur ma tête;
    • Broyé du grain de maïs pour les poulets;
    • Découvrir un village, une langue et un peuple traditionnel Xhosa, dont je suis tombé amoureux;
  • Avoir l’honneur d’être invité à un rituel Xhosa, pendant lequel on sacrifie et mange une des vaches familiales afin de purifier les nouveaux enfants nés depuis le dernier rituel.

Marcher avant de courir

Entre Coffee Bay et Bulungula, il y a 56 km de route, mais si on s’en croit capable, on peut endosser notre sac à dos et chausser nos souliers de trek pour parcourir cette distance à pieds, en longeant la côte. Je m’en croyais capable, j’ai donc accepté le défi, en ne sachant pas trop dans quoi je m'embarquais.

En résumé, c’est un total de huit heures de trek rapide tout le long de la côte de l’océan indien. La distance se fait en deux jours (quatre heures par jour), en passant une nuit à Lubanzi, un petit village de quelques centaines d’habitants.

Jour 1

Je quitte mon auberge de jeunesse (http://www.coffeeshack.co.za/) vers les huit heures du matin et on m’explique en deux ou trois phrases comment me rendre jusqu’à Lubanzi. Mon sac à dos sur les épaules, je commence à marcher.

Comme c’était ma première vraie longue distance à la marche, je savais que je devais me donner une chance en adaptant mon défi. La veille, j’avais divisé le contenu de mon sac pour en réduire son poids à environ 10 kg au lieu de 15. J’avais beaucoup plus que le strict nécessaire pour les deux jours de trek, mais c’était pour moi le moyen de définir mes limites. Le reste de mes trucs seraient livrés par l’auberge de jeunesse jusqu’à Bulungula. J’avais aussi ajouté une bouteille d’eau de 500 ml, un sandwich, 2 fruits, 2 barres tendres, en plus d’avoir rempli ma gourde de 1.8 L. On m’avait aussi averti qu’il y avait un grand risque de pluie. J’avais donc mon imperméable et j’avais scellé tous mes papiers et mes électroniques dans mon sac à dos.

J’entame donc mon chemin en suivant les indications de base qu’on m’a données. Il ne se passe pas 10 minutes que j’ai l’étrange impression d’être sur le mauvais chemin. Effectivement, c’est en demandant à un habitant que j’apprends que j’aurais dû tourner à gauche il y a de cela huit minutes… ça commençait bien. Malgré tout, une fois le bon chemin repris, le trajet était assez facile à suivre. On m’avait dit : « tant et aussi longtemps que tu gardes l’océan à ta gauche, tu es dans la bonne direction. »

Comme le sentier est étroit et légèrement en pente, le degré de difficulté en est augmenté comparativement à une marche dans la forêt. De plus, le chemin monte et descend en alternance, ce qui me permet de reprendre mon souffle, mais qui, à la longue, fatigue mes cuisses et endommage mes articulations. Ces deux petites contraintes sont toutefois vite oubliées face à mon admiration des paysages qui se présentent devant moi.

À partir de la troisième heure, mon corps s’est toutefois permis de me rappeler ces deux contraintes. Mes pieds se sont mis à élancer le long des arches et sur le dessus. Ajoutez à cela mes genoux, qui en ont assez des impacts des descentes et mes cuisses de l’effort des montées. Chaque pas me fait souffrir le martyre et me fait plier les genoux sous la douleur.

Comme si ce n’est pas assez, la marée haute d’aujourd’hui rend la traversée de la rivière impossible et m’oblige à faire un détour de 15 minutes, pendant lequel je me perds bien sûr à quelques reprises (ce détour m’a toutefois permis de croiser quelques huttes isolées et de demander mon chemin à leurs habitants). Je suis donc là, épuisé et souffrant, avec la pluie qui s’est mise de la partie, à espérer mon arrivée à Lubanzi le plus tôt possible.

Frédéric Dion, l’aventurier, m’a dit un jour que le meilleur moment pour sortir ta caméra, c'est lorsque tu as tout sauf le goût de le faire.

J’ai toutefois quand même réussi à me rendre à Lubanzi dans le délai prévu de quatre heures, mais complètement vidé d’énergie et en douleur.

Jour 2

Malgré l’intensité du jour 1, qui avait eu raison de mon corps et de mon moral, un bon souper, un massage personnel de pieds, quelques ibuprofènes et une excellente nuit de sommeil à Lubanzi, m’ont remis sur pieds. Je suis donc prêt à affronter cette deuxième moitié de ma randonnée. Cependant, cette fois-ci, je l’affronte d’une façon différente. Je suivrai les conseils de mes hôtes à Lubanzi en contournant les sommets des collines, en suivant les trajets déjà piétinés par les habitants locaux (qui savent comment économiser leur énergie) et en prenant le temps nécessaire pour compléter heureux et en forme.

C’est donc d’un pas lent, mais régulier que je traverse des contrées aussi belles et sereines que la première journée. Pendant cette deuxième, j’ai l’honneur de croiser plus de petits villages accueillants et le plaisir de sillonner de longues plages. Je croise aussi plusieurs animaux (vaches, chevaux, poneys, moutons, chèvres et poulets) et je me permets une petite baignade (et douche) dans un lagon sur mon chemin, qui me causera ma première otite de vie d’adulte. Cette dernière journée se passe donc sans réelle embuche, même s’il y a encore quelques averses, que je me perds une ou deux fois, et que je prends six heures au lieu des quatre habituelles. Tout dépend de l’état d’esprit dans lequel j’avais fait le choix de me mesurer à cette épreuve.

Ainsi, j’aperçois pour la première fois Bulungula Lodge à la suite du dernier tournant, juste à l’entrée d’une longue et dernière plage. Je suis à une heure de marche de mon objectif lorsqu’un étrange sentiment s’empare de moi. Je suis soudainement envahi par une grande nostalgie et tristesse en même temps. Tout au long de mes parcours des deux derniers jours, mes douleurs physiques m’ont fait rêver à mon arrivée, mais maintenant que j’y suis, j’ai envie de rebrousser chemin. Ce processus psychologique et mental me manque déjà. J’ai l’impression que je commençais tout juste à toucher à quelque chose de profond. Que j’étais sur le point d’en découvrir plus sur moi. Je crois même, ne soit qu’une seconde, avoir touché au bien-être personnel que j’étais venu chercher ici.

Au fur et à mesure que l’auberge se rapproche de moi, je ralentis le pas, je m’arrête, je me trouve des raisons pour ne plus avancer : un beau coquillage, mon sac à réajuster, du sable dans mes sandales, une photo à prendre, etc.

Je suis présentement à 500 mètres de l’apogée de cette première aventure de deux jours et je me mets déjà à rêver à la prochaine.


Cape Town | Afrique du Sud (Photos et vidéos)

Cape Town | Afrique du Sud

Cape Town se veut un mélange parfait entre l’Europe et l’Afrique. Il est facile d’y voyager en tout point (transports, logements, visites, activités) et il y en a pour tous les goûts. Selon moi, elle m’a permis un doux passage culturel entre mon Canada et l’Afrique. Toutefois, au bout de quelques jours, je me sens prêt à continuer mon chemin. Je vous présente donc mes points forts en images et vidéos. 

Résumé de mes activités

  • Visites guidées gratuites du centre-ville, sur l’historique de Cape Town, et du quartier de Bo-Kaap;
  • Montée de « Lion’s head » pour y piqueniquer et y voir un magnifique coucher de soleil;
  • Visite guidée à bord du « Cape Town Sightseeing Bus » me permettant d’atteindre des endroits tels :
    • Kirstenbosch Garden;
    • Hout Bay Market;
    • Camps Bay;
    • V&A Waterfront.
  • Assister à une messe chrétienne particulière (voir mon article Le Pasteur est là!).
  • Location d'une voiture pour un "road trip" vers le sud:
    • Mzolis, restaurant de BBQ situé dans la commune de Gugulethu;
    • Boulder's Bay et ses pingouins;
    • Cape Point.

Le Pasteur est là!

Lorsque Yonga, une amie de l’auberge, m’invita à l’accompagner à l’église ce dimanche, j’étais loin de m’attendre à une telle expérience. Nous sommes loin des célébrations catholiques québécoises d’une durée d’une heure, en silence, sur des bancs en bois, ou même d’une messe gospel auquel on ajoute des chants et des prières. C’était LA célébration, celle qu’on voit seulement dans les documentaires.

L'église

Elle est loin et isolée. Nous avons dû marcher pendant 20 minutes, pour ensuite prendre un taxi pendant 30 minutes. Celui-ci nous a déposés dans un quartier industriel, à partir duquel nous devions marcher encore 15 autres minutes parmi les multiples entrepôts pour enfin atteindre « l’église ».

Malgré l’interdiction, j’ai réussi à prendre cette courte vidéo. Ce n’est vraiment pas grand-chose, mais ça vous donnera une petite idée de l’église et son ambiance.

Cette église, improvisée dans une ancienne usine abandonnée et délimitée par une clôture gardée, pouvait contenir approximativement 1000 personnes et croyez-moi, elle était pleine. Des centaines de chaises en plastique étaient alignées par groupe d’environ 300 personnes et faisaient toutes faces à l’autel improvisé. Celui-ci se limitait à des rideaux bleus, un tapis rouge, un orchestre et des caméras pour filmer le tout.

J’espère réussir à vous décrire adéquatement cette expérience et à vous faire vivre les mêmes émotions que moi, sans aucune teinte de jugement que ce soit, car je vous assure que c’était particulier et mystérieux, mais tout aussi unique et inspirant à la fois. J’ai été chanceux d’avoir accès à une telle expérience.

La célébration

Chaque dimanche, des centaines de croyants et croyantes, d’un peu partout à Cape Town, se déplacent pour assister à la célébration. Il n’y a pas vraiment de début, ni de fin, et les gens arrivent quand ils peuvent et repartent quand ils sont fatigués. Même si des activités diverses tels des chants, des prières, des témoignages et des sermons se déroulent constamment entre 9h et 16h, l’attraction principale de cet événement est la présence du Pasteur.

Nous arrivons donc vers 10h, avec une entrée remarquée, car je suis le seul blanc parmi toutes et tous. Deux organisateurs me demandent si je suis journaliste et m’avertissent qu’il m’est strictement interdit de prendre des photos ou des vidéos. L’église est déjà presque pleine et on nous attitrent chacun une chaise.

Le Pasteur

Depuis environ deux heures, les prêtres et les organisateurs animent la foule dans une ambiance de fête et nous préparent à l’arrivée du Pasteur. Nous ne savons ni quand, ni d’où il arrivera. Face au mystère entourant ce fameux personnage, je demande à Yonga comment je saurai que le Pasteur est arrivé, et celle-ci de me répondre « Ne t’en fais pas… tu sauras ».

Il faut comprendre que les Pasteurs sont les personnes les plus importantes de toutes les branches de cette communauté catholique. Il n’y en a que quelques-uns dans toute l’Afrique du Sud et ils se promènent d’une église à l’autre. On les appelle aussi les prophètes. Ils sont ceux qui amènent la bonne nouvelle, qui connaissent la prophétie et qui représentent le lien direct entre Dieu et les disciples. Ils permettent aussi les miracles.

On m’avait laissé savoir que le Pasteur d’aujourd’hui était spécial, et qu’il venait très rarement à Cape Town; il arrivait justement du Malawi. Spécial ou non, ce Pasteur allait provoquer une véritable commotion auprès de la communauté.

La commotion

Sans avertir, en plein milieu d’un témoignage, une personne crie « THE PASTOR IS HERE! ». À ce moment même, les 1000 personnes se lèvent simultanément et se mettent toutes et tous à crier « THE PASTOR IS HERE! THE PASTOR IS HERE! THE PASTOR IS HERE! »; le tout entremêlé d’applaudissements, de sifflements, de sauts, de cris, de pleurs et d’une musique épique. Tous regardent dans la même direction pour ne pas manquer l’entrée de la vedette du jour.

Dès l’ouverture de la porte, le Pasteur apparait, entouré d’une dizaine de gardes du corps (c’est presque autant que le président des États-Unis, ça). Un homme, noir, bien sûr, imposant, avec une bonne carrure et habillé d’un complet beige… un homme comme tout le monde quoi. Accompagné du band, il entre en chantant un hymne que tous s’empressent de chanter avec lui en levant les bras dans les airs et en se balançant de gauche à droite.

Imaginez 1000 personnes qui explosent d’émotion et de joie en même temps. Il ne faut toutefois pas comparer ce moment à l’admiration qu’on voue et manifeste à vedette lors d’un spectacle. Ici, je suis témoin de centaine d’hommes, de femmes et d’enfants qui, du plus profond de leur cœur, livrent un acte d’amour sincère à l’homme représentant leur Dieu. Le Dieu miséricordieux qui les a mis au monde, qui les a fait grandir, qui les a marié, qui leur a permis de tomber enceinte. Le Dieu qui les a aidé à passer à travers tant d’épreuves, le Dieu qui était avec eux lors de la rémission de leur cancer, le Dieu qui leur ont offert un travail pour subvenir aux besoins de leur famille, le Dieu qu’ils prient tous les jours et celui avec qui ils mourront.

Ce sont toutes ces émotions, multipliées par l’entrainement des centaines d’autres personnes qui passent à travers moi et qui font monter la boule dans ma gorge et les larmes dans mes yeux. C’est l’énergie dégagée par la foule qui m’envahit, me submerge et me désoriente complètement. Je ne suis pas vraiment catholique, ni vraiment croyant, et je ne connaissais même pas l’importance d’un Pasteur il y a de cela deux heures, mais en face de tant d’émotions, je suis énormément touché.

La goutte de trop

Après cette entrée phénoménale, je redescends de mon nuage et je prends conscience de l’état des gens autour de moi. Pendant que le Pasteur fait le tour de l’église et qu’il demande à Dieu d’effacer les péchés et la misère des gens, certains se mettent à trembler, d’autres se laissent tomber sur leurs voisins. Des hommes pleurent à en perdre la force de leurs jambes et des femmes hurlent à s’en arracher les cordes vocales. Les organisateurs et caméramans se ruent sur les « élus » pour nous permettre à tous de constater l’intensité du moment. Tous les autres continuent à lever les bras vers le ciel et répondent en criant aux appels du Pasteur. Celui-ci pointe alors des individus supposément choisis par Dieu pour ensuite les tirer vers lui, leur déposer la main sur le front et les repousser d’un mouvement vif en criant « IT IS GONE! ».

Il revient ensuite à l’avant, l’ambiance se calme et il demande aux gens de montrer leurs portefeuilles, leurs téléphones et leurs papiers d’identité bien haut, à bout de bras. C’est alors qu’il invite Dieu à exaucer les prières d’une personne dans la salle. Une femme crie alors qu’on vient de lui transférer 2000 rands (environ 200 $) dans son compte en banque. Elle montre ensuite son téléphone à la caméra pour qu’on puisse constater le transfert, provenant d’une source inconnue. Le Pasteur invite finalement les gens à venir prier avec lui à l’avant et à déposer des offrandes (monétaires, bien sûr) dans l’énorme calice.

Reconnaissance

Malgré cette fin quelque peu déstabilisante, je suis extrêmement reconnaissant envers cette communauté de m’avoir permis d’assister à un événement aussi intime. J’étais un étranger à qui ils ont, avec certaines précautions, offert une place dans leur communauté. J’y ai croisé des gens bons, des âmes blessées, des sourires sincères et, à mon grand bonheur, des enfants adorables et curieux.


Je voulais terminer en vous montrant le genre de manifestations auxquelles j’ai assisté (sauf que mon Pasteur ne le faisait pas à distance, et il les prenait un par un):


Période d'adaptation

Pourquoi est-ce que je me sens ainsi? Éteint… Seul… Indécis… Vide.

Jusqu’à présent, j’ai l’impression qu’il n’y a rien ici, rien de ce qui m’allumait tant au Québec : la famille, l’accueil, les enfants, l’admiration, la générosité, le lien d’appartenance, etc.

Je pourrais énumérer une tonne de choses à voir, à faire et à apprécier à Cape Town. J’ai toutefois l’impression que ces choses m’éloignent de ce que je venais vraiment chercher ici. Elles sont peut-être trop faciles, ou trop effervescentes.

J’ai des rêves différents. J’aimerais que ces rêves se réalisent immédiatement. Il y a des moments où j’aimerais « sauter » cette étape de mon voyage. Passer directement au-delà de cette période de transition « touristique » et me retrouver au milieu de nulle part, auprès d’une tribu ou d’une petite communauté.

Mais j’ose croire que je dois rester patient. Que je « briserais » le rythme normal de l’adaptation. Sauf que, pendant ce temps, je brûle les deux ressources les plus critiques de mon voyage : l’argent et le temps.


Mes premiers pas

Voilà… Dans seulement un dodo j’aurai les fesses sur mon siège d’avion en direction de cette nouvelle aventure. Un long chemin m’attend, mais un aussi long a occupé ma pensée et mon temps depuis la dernière année. Qu’est-ce qui m’a mené à cette décision? Comment me suis-je préparé mentalement, physiquement et techniquement? Comment entrevois-je cette odyssée, qui, sans contredit, a commencée il y a plusieurs mois ? Voici un survol des réponses à ces questions. 

Pourquoi?

Il y a quelques semaines, une personne que je venais tout juste de rencontrer et qui ne me connaissait pas, m’a posé cette question, m’obligeant à bâtir une réponse claire, sincère et qui résultait de mes derniers mois de réflexions personnelles.

Je lui ai donc raconté mon expérience marquante au Ghana, où j’ai eu deux grandes révélations personnelles; deux vérités qui définissent qui est Francis; deux certitudes profondes de ma personne qui devront être présentes tout le reste de ma vie. Je lui ai parlé de mon besoin d’être entouré d’enfants, qui ce soit à travers le bénévolat, l’adoption ou mes propres enfants. Et je lui ai confié que j’ai besoin, comme plusieurs, de me sentir utile et de sentir que j’ai un impact chez les gens qui croisent mon chemin. J’ai besoin de sentir que j’inspire les autres, ne serait-ce qu’un peu.

Dans cette prochaine aventure, j’espère donc découvrir d’autres grandes valeurs profondes et intrinsèques comme celles qui m’ont frappé de plein fouet au Ghana. De plus, l’aspect humanitaire me permettra de combler mon besoin de présence des enfants et mon besoin d’apporter des changements concrets dans les communautés que je visiterai. je veux sortir de ma “routine” quotidienne et de mon cadre de vie actuel pour permettre à mon esprit et mon coeur de laisser entrer toute nouvelle idée ou émotion, ce qui me permettrait d’en découvrir plus sur moi.

Mais maintenant que mon objectif personnel est défini, comment ai-je mis en scène un tel changement?

Préparations mentale, physique et technique

J’ai commencé par lire… énormément. Au début, je lisais seulement des livres sur l’état mental et sur le mode de vie qu’implique le voyage à long terme. Des livres tels que « Vagabonding: An Uncommon Guide to the Art of Long-Term World Travel » de Rolf Potts, « Vivre pour se sentir vivant » de Albert Bosch, « L’homme qui voulait être heureux » de Laurent Gounelle, « Le tour du monde en stop » de Ludovic Lehler et « La Frousse autour du monde » de Bruno Blanchet.

Ces livres m’ont permis de comprendre dans quel état psychologique je devrais me mettre si j’entamais ce grand voyage. Ils ont réussi à me faire rêver et ils m’ont convaincu que je serais capable d’adopter un tel état d’esprit. Si je voulais réussir et apprécier une telle aventure, je devais la voir comme on voit la vie en général, avec ses hauts et ses bas, avec ses avantages et ses inconvénients, avec ses moments encourageants et ses moments qui nous donnent le goût d’abandonner. Il y a beaucoup de choses que j’aime dans ma vie actuelle et il y a des choses qui me dérangent. Il y aura aussi, là-bas, énormément de choses à apprécier, mais aussi d’autres qui me contrarieront. C’est la beauté de la vie, en voyage ou non.

Pendant les quelques mois qui suivirent la plantation de cette graine dans mon esprit, je suis passé par le doute, la peur, le vertige, l’envie, l’excitation et la fierté. J’ai connu une période où mon conscient voulait partir, mais où mon inconscient (à travers mes rêves) voulait rester; une période de multiples discussions avec mes proches pour m’aider à comprendre et me convaincre (ou me dissuader) de passer à l’action; une période d’annonces et d’explications à mon entourage; et une période de mise en place physique et technique de ma décision.

Physiquement, je voulais simplement réduire le choc du passage d’un mode de vie sédentaire à un mode de vie actif, qui comprend de longues marches et des randonnées plus difficiles. Je me suis donc mis au jogging. Graduellement, je suis passé du gros gras qui « pompe » après dix enjambées de jogging, au gros, toujours gras mais heureux, qui a réussi à jogger un 9 km en une heure.

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Techniquement, ce sont des centaines d’heures à coordonner mon absence au Québec (et la tonne de paperasses que ça implique), à vendre mes biens, à mettre en place mon blog, à faire des recherches sur chaque destination, à organiser mon trajet et à rassembler les informations sur quoi faire, quoi voir, où dormir, quoi manger, comment me déplacer, comment aider, et ce, pour chacun des pays.

Voici un exemple de ce que ça peut donner :

Finalement, c’est aussi s’équiper pour vivre et survivre avec le strict minimum. Je ne sais pas si vous le savez, mais faire entrer toute une vie dans un sac à dos de 36 litres, ce n’est pas évident. Ça nécessite des recherches, des achats, du remballage, de la compression et BEAUCOUP de choix déchirants.

Prêt, pas prêt, j'y vais

Je suis prêt : émotivement, psychologiquement, physiquement et techniquement prêt. Je ne sais pas si mes espoirs d’échanges équitables sont réalistes et s’il me sera possible de bénéficier de la générosité des Africaines et des Africains. J’ai toutefois confiance en l’humain, je ne fais pas de promesses, et je me réserve le droit de m’adapter ou de faire évoluer mon projet.

Tant de belles choses se sont présentées à moi dans les derniers mois, des choses qui me peinent énormément de quitter, mais qui, sans ce voyage, ne me seraient jamais arrivées.

Je tiens à remercier tous ceux et celles qui m’ont encouragé. Je remercie ceux et celles qui ont donné à ma cause. Je vous remercie tous et toutes de votre générosité et de votre hospitalité.

Si vous avez besoin de conseils, n’hésitez pas. Une telle aventure nécessite beaucoup de préparation et énormément de recherches, il serait dommage que je sois le seul à en profiter.

Et je réitère que vous serez toujours les bienvenu(e)s à voyager avec moi. Il me fera plaisir d’ajuster mon voyage pour nous permettre de le faire ensemble.